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Pollution radioactive dans l’eau du robinet à Agen et ses environs

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La population du bassin d’Agen(1), qui consomme l’eau de la Garonne, fait partie des 6,4 millions de citoyens français dont l’eau du robinet est polluée par le tritium radioactif(2).

Le tritium traverse les métaux et le béton, il n’est donc pas confinable et les centrales nucléaires, obligées de le rejeter dans l’environnement, détiennent des droits de rejet que lui accorde l’état français.
L’industrie nucléaire a longtemps considéré cet élément radioactif comme inoffensif, mais des études récentes montrent que la toxicité du tritium a été sous-évaluée, notamment quand il est absorbé par l’organisme. Il pénètre alors dans l’ADN des cellules.
Le contrôle sanitaire de la qualité radiologique des eaux destinées à la consommation humaine n’est obligatoire que depuis 2005(3).

Parmi les ‘pistes’ officielles pour connaître la présence de Tritium figurent les analyses des ARS (Agences Régionales de Santé) qui effectue des prélèvements aux points de captage (donc dans l’eau qui va dans les canalisations), et le les analyses du laboratoire vétérinaire LVD82 qui effectue des analyses sur des prélèvements effectués dans la Garonne, pour ce qui nous concerne ici, entre la centrale de Golfech et les points de captage d’Agen. Les résultats de ces deux organismes sont présentés ci-après, on constatera qu’ils se contredisent parce que les prélèvements sont faits à des dates quelconques sans tenir compte des rejets de Tritium effectués par la centrale Golfech…

Dans chaque département les ARS effectuent des analyses de l’eau qui sont publiées sur le site https://solidarites-sante.gouv.fr/sante-et-environnement/eaux/eau . Ces analyses indiquent, entre autres, la radioactivité due à la présence de Tritium radioactif.

Ces résultats depuis janvier 2019 sont représentés dans le tableau ci-dessous :

Tableau : présence de Tritium relevé par l’ARS du Lot-et-Garonne pour l’année 2019

Les niveaux les plus élevés de janvier et mars 2019, qui pourraient être dus à des rejets de réservoir, ne correspondent pas aux niveaux détectés par le Laboratoire Vétérinaire Départemental du Tarn et Garonne (LVD82) qui indique une valeur < 6 Bq/l pour ces mois (la même qu’en amont de la centrale, à Montauban par exemple).

On peut donc supposer qu’à chaque rejet de la centrale des seuils d’une cinquantaine de Bq (ou plus) seraient détectés si l’on s’en donnait la peine.
Reportez-vous au tableau des rejets : en 2019 environ 25 % du temps ces seuils de radioactivité du au Tritium se retrouvent très probablement dans l’eau du robinet.

D’autre part ces analyses des ARS qui étaient auparavant classées par ordre alphabétiques ne le sont plus depuis début 2020. Ce qui rend la recherche des ces informations plus difficiles, les résultats des analyses d’activité radiologiques se trouvant dans des listes d’analyses parmi les plus longues… Des informations qui semblent être là pour qu’on ne les consulte pas.

Certes ces niveaux sont inférieurs au seuil de potabilité défini par l’OMS qui est de 10 000 Bq/l. Mais la CRIIRAD(4) fait remarquer que le risque que l’OMS accepte pour le tritium est 160 fois supérieur à celui qu’elle prend en référence pour les cancérigènes chimiques. Soit 100 000 cancers pour le tritium contre 670 cancers pour le chimique. Ce seuil de potabilité devrait être revu à 60 Bq/l (environ 10 000 Bq/l / 160) et même 30 Bq/l pour protéger les plus vulnérables (nourrissons, enfants, femmes enceintes). La CRIIRAD en a informé la ministre, madame Buzyn, par courrier(5).
Le seuil de qualité de 100 Bq/l devrait lui aussi être revu à la baisse, car, nous dit la CRIIRAD, si l’eau est d’origine superficielle et supérieur à 3 Bq/l il y a une très forte suspicion de pollution radioactive.

L’ARS du Lot-et-Garonne nous a répondu qu’elle ne peut, dans le cadre des textes actuels, diligenter une enquête que si la radioactivité dépasse le seuil de qualité de 100 Bq/l.
Il n’y a donc rien à espérer non plus pour les niveaux de janvier et mars (43,5 et 55,9) qui dépassent très largement ce qui devrait être le seuil de potabilité (30 Bq/l). L’ARS du Lot-et-Garonne, qui nous renvoie au législateur, souhaite malgré tout améliorer ses contrôles et dès l’année prochaine (2020) procéder à une analyse par mois pour chacun des lieux de captage (Boé, Le Passage, Agen).

Le LVD82 (Laboratoire Vétérinaire Départemental du Tarn et Garonne), qui effectue des analyses pour la CLI(6) de Golfech, met à la disposition du public(7) des rapports de mesure du Tritium de l’eau de la Garonne. Le LVD82 effectuent les analyses environ un mois après les prélèvements et ces prélèvements sont presque toujours effectués avant les rejets de réservoir ou après plusieurs jours (les rejets durent entre 25 et 180 heures). Le LVD82 est bien bonne de nous informer de ces dates de rejet sur ses rapports ! Si elle pouvait faire ses prélèvements pendant ces rejets, ses résultats seraient bien plus utiles…

Le LVD82 informe d’un niveau de 97∓ 7 Bq/l en septembre et 104 ∓ 8 Bq/l en octobre 2019 à Lamagistère entre Golfech et Agen. La mesure de septembre correspond à un prélèvement du 3 septembre effectué sur la fin d’un rejet de 180 heures se terminant le 4 septembre. EDF indique un niveau de 60 Bq/l pour ce même rejet (de 97 Bq/l). Espérons que la CLI de Golfech et l’ASN se saisirons de ce mensonge.

À part ces analyses qui ne nous informent qu’épisodiquement des pollutions en cours il y a bien des analyses en continu avec les balises Hydrotéléray de l’IRSN. Ces balises réalisent une analyse toutes les deux heures. Mais la méthode d’analyse utilisée (spectrométrie gamma) ne détecte pas le rayonnement ß (Béta) caractéristique du Tritium. La balise Hydrotéléray de Boé a été en panne de janvier à août 2019.

Une certitude : l’eau du robinet est polluée par le Tritium radioactif rejeté par la centrale nucléaire de Golfech. Un peu, beaucoup ou passionnément ? Les analyses ne permettent pas de le savoir exactement puisque les organismes d’état ne mesurent pas ce qu’il y a quand il y a! Quelle quantité de radioactivité va dans notre robinet quand Golfech effectue des rejets de Tritium ?
En 2019 il y a eu 35 rejets de cuve pour une durée totale de 2152 heures, soit précisément 89,68 jours. La centrale nucléaire de Golfech a rejeté du Tritium 24,56 % du temps soit 8,1 jours par mois.

Ne perdons pas de vue que les chiffres indiqués dans cette enquête correspondent à des données fournies par des organismes (ARS et LVD82) dont la crédibilité peut être mise en cause puisque ces organismes ne mesurent pas ce qui devrait l’être (la radioactivité de l’eau du robinet et du fleuve pendant les rejets).
La CLI(6) (Commission Locale d’Information) qui utilise les analyses du LVD82 minimise donc au yeux du public et des élus la pollution radioactive produite par la centrale nucléaire de Golfech.

Les sites de production d’eau d’Agen (Lacapelette et Rouquet) ont produit en 2018 une quantité de 5 589 437 m³ d’eau totalement prélevés dans la Garonne (source www.agglo-agen.net rapport-2018_gestion_deleguee.pdf ). Eviter de prélever l’eau de la Garonne pendant les rejets de tritium de Golfech nécessiterait de trouver d’autres sources d’approvisionnement ou de stocker 19 % de cette quantité c’est à dire ‭1 061 993 m³ ou 354 piscines olympiques de 3000 m³. Le captage du Rouquet dispose bien de la possibilité de capter de l’eau dans des nappes profondes mais cette eau de forage n’est pas ou peu utilisée (0 m³ en 2018).

Beaucoup d’argent du contribuable est dépensé pour nous rassurer et disposer autour de nous un beau nuage de transparence. Boire de l’eau en bouteille plastique ou inviter le Tritium dans vos verres et votre cuisine, il n’y a pas d’autre choix.
Évitez si possible l’eau du robinet dans les biberons.


L’administration considère que l’exploitant des centrales (EDF) est responsable de ses rejets. Mais ces rejets ne sont pas mesurés et les conséquences sont niées. Cette responsabilité peut-être mise en parallèle avec sa faible responsabilité civile en cas d’accident majeur (91 millions d’euros pour des dégâts de plusieurs milliers de milliard d’Euro).

On ne peut pas dire que la radioactivité passe à travers les mailles du filet, car il n’y a pas de filet. Pas même une passoire. On nous répliquera peut-être que de toute façon une analyse ne protège pas de la pollution.
Il serait temps, au moment où les énergies renouvelables deviennent moins coûteuses que le nucléaire, et ou même le démantèlement semble moins onéreux que la poursuite du nucléaire, il serait temps donc d’enquêter sur les vraies raisons qui veulent continuer à nous faire courir des risques qui, de plus en plus, sont de vrais dangers qui se réalisent.

La nécessité obsessionnelle de protéger les entreprises et la valorisation, et la peur de l’opinion publique qui va avec, incite les responsables à préférer mettre en danger les populations plutôt que d’informer et de protéger. A-t-on envisager de fermer les robinets du captage quand la pollution passe puis de les rouvrir ensuite ?
N’est-il pas légitime, d’autre part, que les populations soient informées des agressions infligées aux fleuves et rivières contaminés ? Qu’il s’agisse de la Garonne, de la Loire, de la Seine, du Rhône, etc.
Exigeons une eau du robinet sans Tritium radioactif et des analyses radiologiques indépendantes nous informant avec précision des agressions radioactives subies par nos fleuves et nos rivières qui sont un bien commun irremplaçable.

Difficile d’imaginer que des gens croient encore que les centrales nucléaires sont des grosses bouilloires qui ne produisent que de l’électricité et de l’eau chaude.
Qu’en est-il des productions agricoles ? Depuis Fukushima mangez-vous encore du poisson ?

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1- Concerne les communes suivantes :AGEN, BOE, BON-ENCONTRE, CASTELCULIER, BOURG ET PLAINE, LAFOX – BOURG ET PLAINE, PONT-DU-CASSE (sauf Coteaux Artigue).

2 – Comme l’indique la carte de l’ACRO (d’après ARS, SISE-EAUX) http://www.acro.eu.org/carteeaupotable/index.html#7/47.832/1.6703 – « …on peut atteindre quelques dizaines de Bq/l quand le prélèvement est réalisé pendant le rejet d’un réservoir ». EDF (21ème conférence des CLI, 9 décembre 2009, Alain Vicaud).

3 – En Tarn-et-Garonne, l’arrêté du 18 septembre 2006 autorise l’exploitant du site nucléaire de Golfech à rejeter des effluents liquides. Article 19, paragraphe IV : « L’activité volumique mesurée dans l’environnement (…) ne doit pas dépasser » pour le tritium en « moyenne journalière 140 Bq/litre ».

4 – La CRIIRAD – Commission de Recherche et d’Information Indépendantes sur la Radioactivité. http://www.criirad.org/

5 – http://www.criirad.org/eau%20potable/2019-10-21_lo_sante_H3-eau_2.pdf

6 – CLI – Commission Locale d’Information : structure d’information et de concertation mise en place auprès d’une installation nucléaire, elle doit favoriser l’information du public en matière de sûreté. www.cligolfech.org/

7 –http://www.lvd82.fr/index.php?id=1650

Pour vérifier vous-mêmes n’hésitez pas à suivre la procédure indiquée par la CRIIRAD: http://www.criirad.org/eau%20potable/2019-07-01_H3_10.000%20Bq_3.pdf

Rejets de réservoir Golfech / LVD82
moisTDate Durée heures calculée
JanvierT304/01/2019123,17
JanvierT110/01/201946,50
JanvierT318/01/201968,15
JanvierT125/01/201935,83
févrierT301/02/201928,03
févrierT113/02/201927,42
marsT306/03/201977,10
marsT123/03/201953,20
avrilT306/04/201944,13
avrilT114/04/201928,43
avrilT326/04/201935,82
maiT107/05/201942,77
maiT324/05/201946,78
juinT106/06/201949,97
juinT312/06/201983,82
juinT121/06/201956,00
juinT326/06/201957,98
juilletT109/07/201998,78
juilletT324/07/201995,40
aoûtT107/08/201990,77
aoûtT313/08/2019156,78
aoûtT122/08/201962,60
aoûtT328/08/201971,58
septembreT301/09/201998,08
septembreT108/09/2019112,08
septembreT319/09/201964,83
octobreT101/10/2019134,27
octobreT312/10/201976,72
novembreT101/11/201943,32
novembreS308/11/201916,92
novembreT309/11/201921,22
novembreT123/11/201928,17
décembreT305/12/201925,65
décembreT119/12/201924,93
décembreT328/12/201925,00
    
    
    
    
    
NOMBRE REJETS35 2152,2 heures