Tout un chacun a compris que la production d’électricité nucléaire ne présente pas que des avantages.
Mais quelles sont les incidences locales particulières, ici en Lot-et-Garonne ou en Tarn-et-Garonne, de la pollution générée par le fonctionnement de la centrale de Golfech ?

Comprendre pour agir.
L’intérêt de certains ne doit pas rendre les autres aveugles.

En mai 1986, quand le nuage radioactif émis par l’accident de Tchernobyl était censé ne pas avoir traversé la frontière, la CRIIRAD* a été le premier laboratoire à réaliser des mesures radiologiques démontrant un mensonge d’état et un mensonge du lobby nucléaire, refusant de voir leurs intérêts mis en cause.
* CRIIRAD : Commission de recherche et d’information indépendantes sur la radioactivité

Au RSCRGB nous souhaitons aujourd’hui, comme d’autres hier, rester prudents.
En voici les raisons :

 Pollution radioactive de la Garonne : nos enquêtes et analyses

Les résultats des analyses de la CRIIRAD* sur l’eau de la Garonne et les végétaux

Notre enquête sur la pollution au tritium de l’eau du robinet à Agen et ses environs

Notre dossier : la Garonne polluée par la radioactivité rejetée par la centrale nucléaire de Golfech


◊ Pollution radioactive de la Garonne : les sources d’information 

L’ARS analyse l’eau du robinet :

Le LVD82, Laboratoire Vétérinaire Départemental de Montauban, analyse l’eau de la Garonne ainsi que des végétaux, et indique les dates et durée des rejets (en 2019 : 26 rejets pour 1688 heures, soit plus de 70 jours de rejet, 1 jour sur 5). Les résultats sont disponibles dans des délais variables, au moins de plusieurs mois après les prélèvements et analyses.

Les informations conjointes de l’ARS et de la LVD82 nous ont permis par exemple de réaliser le tableau en vis à vis, très parlant sur l’insuffisance de ces mesures : pas de mesure de la radioactivité en continu, aucune mesure pendant la plupart des rejets, la plupart des prélèvements sont faits en dehors des rejets, rien ne permet d’évaluer la variabilité de la radioactivité pendant les rejets…

IRSN :

La Balise Hydrotéléray de l’ IRSN, à Boe, quand elle n’est pas en panne, réalise une mesure de spectrométrie gamma, de l’eau de la Garonne, en continu (toutes les deux heures). Les mesures Hydrotéléray ne sont pas publiées.


◊ Commentaires sur l’analyse des végétaux

L’étude complète du laboratoire de la CRIIRAD CNPE de Golfech / Impact des rejets radioactifs dans la Garonne. Radioactivité des Végétaux aquatiques

L’analyse des végétaux aquatiques de la Garonne prélevés le 3 octobre 2019 confirme la contamination chronique et persistante du milieu naturel en aval de Golfech.

Le tritium est de l’hydrogène radioactif, le carbone 14 est un isotope radioactif du carbone. Comme toute la matière vivante est constituée d’atomes d’hydrogène et de carbone, une partie du tritium et du carbone 14 rejetés dans l’environnement se retrouvera in fine dans les cellules des organismes vivants y compris dans l’ADN, créant à la longue une irradiation interne qui augmente les risques de cancer (entre autres). Rejeter du tritium et du carbone 14, c’est augmenter les risques pour la faune, la flore et les êtres humains.

Dans le cas de Golfech, l’impact est d’autant plus préoccupant que les eaux potables de dizaines communes, dont celle d’Agen, sont puisées directement dans la Garonne en aval des rejets de Golfech.

Pour le sud-ouest de la France, on relève une contamination des eaux potables par le tritium pour de nombreuses communes situées sur les rives droite et gauche de la Garonne, jusqu’à une cinquantaine de kilomètres en aval de Golfech : Agen, Astaffort, Aubiac, Boé, Bon Encontre, Brax, Bruch, Castelculier, Caudecoste, Colayrac Saint Cirq, Cuq, Estillac, Fals, Feugarolles, Foulayronnes, Lafox, Layrac, Le Passage, Moirax, Montesquieu, Pont du Casse, Roquefort, Saint-Nicolas de la Balerme, Saint-Sixte, Sainte Colombe en Bruilhois, Sauveterre Saint Denis, Thouars sur Garonne.

Plus en aval, du tritium est également détecté (en 2017) à Beaupuy, Lagupie, Marmande, Saint Martin Petit, Saint Pardoux du Breuil, Sainte-Bazeille, soit jusqu’à une centaine de kilomètres en aval des rejets de Golfech.
Le secteur d’Agen constitue une zone nettement impactée.

Extrait de la carte compilée par la CRIIRAD à partir des mesures officielles (en
bleu : niveaux de tritium inférieurs aux limites de détection / en rouge : tritium
détecté)
Extrait de la carte compilée par la CRIIRAD à partir des mesures officielles (en bleu : niveaux de tritium inférieurs aux limites de détection / en rouge : tritium détecté)

◊ Le Lot-et-Garonne dindon de la farce nucléaire

Ce sont les habitants du Lot-et-Garonne qui depuis 2000 mangent et boivent le gros de la radioactivité alors que Golfech et Montauban (en amont) reçoivent dotations, subventions et retombées fiscales.

Une étrange redistribution des… nuisances.

Depuis 2000 la pollution radioactive s’est accrue car c’est à cette époque qu’il a été décidé – sans information des élus ni du public et découvert par “Stop Golfech” – de rabattre une partie importante de la radioactivité en tritium dans les cours d’eau alors que cette pollution était jusqu’alors rejetée dans l’atmosphère.

Chers élus du Lot-et-Garonne qui cherchez des subsides…

N’oubliez pas l’antériorité! Plus de vingt années d’injustice…
http://geoconfluences.ens-lyon.fr/informations-scientifiques/dossiers-regionaux/la-france-des-territoires-en-mutation/articles-scientifiques/nucleaire-territoires-france


◊ Réfutation des normes OMS et françaises

EDF et les autorités sanitaires banalisent la pollution des cours d’eau, par la radioactivité rejetée par les centrales nucléaires, en invoquant la limite sanitaire de 10 000 Bq/l (valeur guide de l’OMS : Organisation Mondiale de la Santé) et la valeur de référence de 100 Bq/l appliquée en France

La CRIIRAD a effectué une analyse critique de ces normes et a conclu que, s’agissant d’une contamination chronique qui affecte de surcroit toute la population dont les groupes à risques (femmes enceintes, jeunes enfants) tout devrait être fait pour réduire les niveaux de contamination et que la norme devrait être fixée à une valeur inférieure à 30 Bq/l voire à 10 Bq/l. Sinon, les risques de cancers à long terme pourraient être supérieurs à plus de 160 fois ceux retenus pour les pollutions de nature chimique.

Analyse critique du seuil de 10 000 Bq/l défini par l’OMS pour le tritium dans l’eau potable : https://www.criirad.org/eau%20potable/2019-07-1_H3_10.000%20Bq_1.pdf

Contamination de l’eau potable par le tritium. Révision à la baisse de la référence de “qualité” de 100 Bq/l : https://www.criirad.org/eau%20potable/2019-07-15_H3_10.000%20Bq_2.pdf

Rappelons que l’OMS est soumise à l’AIEA (lobby nucléaire) par l’accord du 28 mai 1959 : depuis les normes doivent s’adapter aux exigences de l’industrie nucléaire (http://independentwho.org/fr/).

La CRIIRAD nous rappelle également que L’Institut National des Sciences Radiologiques du Japon a montré que les différents effets du tritium sur des cellules de mammifères (destruction, mutation ou induction de cancers) sont plus importants qu’on ne le croyait, et que  la radiotoxicité du tritium semble donc avoir été largement sous-évaluée et que trop peu de travaux existent sur les effets à long terme, notamment génétiques, de la contamination par ce radioélément.


◊ Études sur les impacts sanitaires du fonctionnement des centrales nucléaires

Rayonnement environnemental et santé humaine

Ernest J. Sternglass de l’Université de Pittsburgh.
https://www.sortirdunucleaire.org/Ernest-Sternglass-grand-adversaire-du-nucle%CC%81aire

Cette étude américaine analyse la mortalité infantile et les cancers des jeunes enfants habitant à proximité de centrales nucléaires (jusqu’à 64 km) et sous le vent, AVANT et APRÈS la fermeture des centrales. Cette étude fait état de plus de 10 % de mortalité infantile et de cancers supplémentaires pendant le fonctionnement des centrales. Ce sont donc aussi de nombreuses autres maladies et fragilités (non recensées dans cette étude) que développeront les enfants.
La date de parution de cette étude (an 2000) correspond au moment ou EDF a changé son mode de rejet du tritium et a commencé à rejeter ce dernier dans les fleuves… 

Dans cet article Marc Saint Aroman nous fait un rappel de différentes études en Europe sur ce sujet

IMPORTANT : des études nationales sur le nombre de cancers en France résultant de l’exploitation des centrales nucléaires (et autres activités radiologiques) ne sont pas possibles car il n’existe tout simplement pas en France de registre national des cancers.
https://reporterre.net/Cancers-l-incroyable-aveuglement-sur-une-hausse-vertigineuse

https://www.senat.fr/questions/base/2019/qSEQ190208906.html

Si des registres locaux (Gironde, Lille) peuvent aider à faire des estimations globales, ils ne peuvent pas aider à évaluer correctement des cas particuliers, comme par exemple l’évolution des cancers comparativement en amont et en aval des rejets, avant et après l’an 2000. Les rejets ne sont pas les mêmes sur La Loire (par exemple à Tours dont l’eau du robinet est contaminée 100 % du temps) et la Garonne (Agen, 20 % du temps).


◊ L’eau contaminée de la Garonne alimente aussi les productions agricoles

Nous avons établi (au RCSRGB : Réseau Citoyen de Surveillance de la Radioactivité Golfech Le-Blayais) une liste de 77 captages, à usage d’irrigation, d’eau de la Garonne et dans le seul département du Lot-et-Garonne. Source BNPE – EAUFRANCE.

Selon un ingénieur en analyse de la radioactivité : « … On peut s’attendre pour la composante tritium libre à une valeur proche de celle qui est dans l’eau d’irrigation. Le mieux serait de faire des mesures mais on retombe sur la question des ressources financières ». En clair : des analyses de végétaux issus des productions agricoles incriminées pourraient démontrer la contamination de ces végétaux (comme pour les végétaux aquatiques).


◊ Encore de nombreux incidents  malgré une surveillance renforcée de l’ASN

Dans son dernier bilan, publié le 29 juin 2021, l’ASN (le gendarme du nucléaire) épingle à nouveau le manque de rigueur à la centrale de Golfech.

Déjà en 2019 la direction du site reconnaissait 33 événements significatifs de sûreté pour l’année. Dont 1 incident de niveau 2 lors d’opérations de vidange du circuit primaire.

Parmi les derniers incidents de 2021 :

  • Le 9 octobre 2021 durant une heure, le réacteur 2 était en dehors du domaine de fonctionnement autorisé, la pression du circuit primaire étant supérieure à ce qu’elle aurait dû être. L’incident a été déclaré significatif pour la sûreté, ce qui n’est pas rien (avant les “significatifs”, il y a les “intéressants” qui sont considérés comme moins graves, et encore avant les intéressants il y a les “signaux faibles”). Et c’est le second du genre en à peine trois semainesManifestement, les 5 mois d’arrêt n’ont pas suffit à régler tous les problèmes à Golfech, qu’ils soient matériels, organisationnels ou plus simplement fonctionnels.
  • Mercredi 22 septembre un incident de température dans un réservoir du réacteur n°2 (déjà lui) de la centrale nucléaire de Golfech (alors mis à l’arrêt pour maintenance), a été déclaré par la direction du site à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN). Entre le 15 et le 17 septembre, EDF a laissé monter la température du circuit qui refroidissait le réacteur jusqu’au maximum autorisé et peut être même au delà. À vrai dire l’industriel ne sait pas jusqu’où est montée la température. Alors même que le réacteur montait en puissance. Il a fallu tout stopper et engager son repli (baisser la température et la pression du circuit primaire). Les équipes se sont alors rendues compte que les informations remontées en salle de commande étaient erronées.
  • Le mercredi 18 août « un aléa sur un matériel électrique a provoqué l’indisponibilité d’une soupape du pressuriseur », entraîne la mise à l’arrêt du réacteur de l’unité 1.
  • Le 18 mai le site de Golfech a déclaré « un événement significatif sûreté de niveau 1 ». En cause, une analyse manquante avant la remise en service d’un circuit.

L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a formulé de nombreux reproches à la centrale de Golfech.  Résultat : le site est placé sous surveillance renforcée depuis 2020.

Dans son appréciation générale, le gendarme du nucléaire (l’ASN) estime en effet que “les performances de la centrale sont mauvaises, voire très mauvaises”.

Une rumeur circule de mise sous tutelle de la centrale par l’ASN qui semble ne pas parvenir elle-même à reconnaître l’étendue du ‘manque de rigueur’. Un ‘Stop an Go’ (Stop sûreté) le 18 juin 2021 a été décidé par le directeur de la centrale. Selon des sources fiables en interne ce stop and go aurait duré 4 jours alors que l’ASN ne reconnaît qu’un jour….
Un Stop and Go intervient quand il y a trop d’incidents dans le déroulement des tâches sur un réacteur : on arrête tout, on se pose et on repart… Un Stop and Go de un jour est déjà très grave et très coûteux (1,2 million € par jour).


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